Les sous-sols de Gela, en Sicile1, continuent de livrer des témoignages fascinants de son passé antique. Lors de fouilles menées sur la Via Garibaldi par la société Enel, sous la supervision de la Soprintendenza ai Beni Culturali, une osteotheca en terre cuite datant de la première moitié du VIe siècle av. J.-C. a été mise au jour. Ce récipient, muni de quatre anses et d’un bec verseur, avait été réutilisé dans l’Antiquité comme urne funéraire contenant les restes d’un nourrisson.
Cette découverte s’inscrit dans une tradition funéraire déjà documentée dans la région, notamment par l’archéologue Paolo Orsi au siècle dernier. Outre cette osteotheca, les archéologues ont également mis en évidence les vestiges de deux autres sépultures utilisant la technique de l’enchytrismòs – une pratique funéraire consistant à enterrer des individus dans de grandes jarres en céramique – ainsi que des fragments d’une tombe de type « à cappuccina » et des céramiques importées. Ces éléments permettent de situer l’ensemble du site archéologique dans la première moitié du VIe siècle av. J.-C.
Une pratique funéraire bien attestée en Méditerranée
L’utilisation de jarres ou de récipients en céramique pour l’inhumation des enfants est une coutume funéraire largement répandue dans le monde grec archaïque et en Méditerranée orientale. Ce type de sépulture, appelé enchytrismòs, était couramment utilisé pour les nourrissons et les jeunes enfants, souvent inhumés à proximité des habitations ou dans des nécropoles spécifiques.
La présence d’une osteotheca réaffirme ainsi la continuité de ces pratiques à Gela, une cité fondée vers 688 av. J.-C. par des colons venus de Rhodes et de Crète. Son emplacement stratégique en Sicile en faisait un centre commercial majeur reliant le monde grec, l’Italie et l’Afrique du Nord. Les céramiques importées découvertes à proximité de la sépulture confirment d’ailleurs l’importance de Gela dans les réseaux commerciaux de la Méditerranée archaïque.
Un patrimoine sous surveillance et une mise en valeur future
L’importance de cette découverte a rapidement été soulignée par les autorités locales.
Francesco Scarpinato, l’assesseur régional aux biens culturels, a déclaré :
« Une fois de plus, Gela nous surprend avec des trouvailles d’une valeur historique extraordinaire, qui nous permettent de mieux comprendre des rituels funéraires codifiés et largement diffusés. Ce type de découverte témoigne aussi de l’efficacité de nos politiques de protection préventive, qui garantissent une surveillance archéologique systématique lors de tout chantier affectant le sous-sol urbain. Nous suivrons avec attention la poursuite des fouilles sur les dix mètres linéaires encore à explorer, avec l’espoir que d’autres vestiges de notre passé extraordinaire émergent. »
Après une première phase d’étude et de restauration, la osteotheca et les autres vestiges seront exposés au Musée Archéologique Régional de Gela, dans la province de Caltanissetta. Cette exposition permettra d’enrichir la collection du musée et d’offrir au public un aperçu précieux des pratiques funéraires et des échanges culturels qui ont marqué cette cité grecque antique.
Grâce à ces découvertes, les archéologues espèrent approfondir leur compréhension des rites funéraires en usage à Gela et, plus largement, dans le monde colonial grec en Sicile. Le sous-sol de la ville n’a pas encore livré tous ses secrets, et les recherches à venir pourraient révéler de nouveaux indices sur la vie et la mort dans cette cité florissante de l’Antiquité.
